samedi 20 novembre 2010

Le respire


Elle entre brisant le passage, forgeant sa réputation dans le chaud métal. Elle électrocute les parois, créant une attraction colonisatrice, l'envoyant nager dans la peine de centaines d'années. Elle passe plus vite que la brise et réchauffe mes doigts d'hiver, elle s'en va par delà les anches, vibrante, libre de revenir quand je l'aspirerai encore. Elle voyage sur les chemins de fer pour traverser les grillages, plonger dans les oreilles de cire et y faire la loi, percer les malheurs et le cartilage, abattant barrières et vitraux, piégeant les coeurs au lasso.

Avant d'être bleus, vous étiez sots.

Elle entre poussant les murs, pressée de naître, de trouver qui elle est ou qu'est-ce qu'elle est, de savoir quelle son elle fait quand elle se laisse parler, sortie du tunnel qui l'a retenu le temps d'un jamais. Elle s'est échappée du bayou sans cligner des yeux, directement aux prés, en haut des grandes collines d'espoir, là où ses ancêtres furent libérées, au creux d'un autre souffle qui leur aurait fait l'amour comme des esclaves savourant le pain du jour.
Ce n'est pas un message de bravoure, elle n'est pas porteuse de remède, mais l'harmonica est à l'homme ce que le temps est aux plaies.