
Même si j'y crois pas.
Y'aura toujours en moi quelqu'un d'autre. D'autres moi, d'autres citoyens, des gens bien, cachés sous des rêves de veufs et de païens. Un garçon étendu dans les herbes hautes, laissant ses doigts ramper vers la douce contrée d'une hanche dévoilée, un homme grisonnant dormant dans les cheveux roux de sa femme, un chômeur nocturne au teint d'ordinateur, un musicien épuré, talentueux mais inefficace, un poète décrocheur sans crayon ni efface.
Ce soir, des cierges illuminent la pénombre qui m'empêche d'y voir clair. Je vous écrit une autre fois, sans savoir qui vraiment me lira, dans ma caverneuse chambre de bois qui un jour brûlera, enfin, je l'espère.
C'est pourtant moi, rêveur insatiable, qui ne pense qu'à la mer et à ma Jeanne. C'est pourtant moi, le sauvage, qui se baricade derrière ce mur de faussetés et de rires charitables.
J'envie le pêcheur et son départ, je jalouse le vent et la pluie car, finalement, je n'ai plus l'envie d'être ici. Un pied sur la grève et l'autre dans le fleuve, un dilemme me tracasse et me tord l'esprit. Non, je n'ai point honte de ma race, je suis en amour avec ma patrie.
Seulement, de l'autre côté du rivage, très loin des grands courants, là se trouve mon village.
C'est là.
Le café, la plage, le vieux phare et le cinéma...