dimanche 11 mai 2014

Ze rêve


J'ai eu tellement de questionnements ces temps-ci à propos de mes besoins, de mes raisons de vivre. Ça s'adonne que j'en ai pas tant que ça. Pas mal moins que j'pensais pour dire vrai. Ça va sembler simple si je les énumère. Ça va sembler court. Peut-être, mais ce qu'il faut savoir c'est que dans cette liste de belles choses se trouvent toute la profondeur de mon être. Toutes mes motivations, ma bonne humeur, mes sourires mes rires mes joies. J'dirais qu'il y a aussi de la tristesse, veux veux pas, y'en a dans à peu près tout. Par contre, j'avoue être aussi surpris que toi en t'affirmant tout de suite qu'encore là, y'en a pas mal moins que j'pensais. Pis ça fait ben mon affaire.

J'suis jamais chez nous. Sur la route, dans mon char, le moteur éteint, la radio qui parle et qui se dissipe dans le vent avec la boucane et son odeur. Dans l'stationnement d'la shop, parké en dessous des arbres, j'entends les branches craquer derrière dans le fossé qui sépare la gravelle et l'herbe. Un fossé plein d'esti de cochonneries. Sérieux c'est dégueulasse. J'suis certain que si on creusait, dix pieds de terre, on trouverait encore des butchs de toppe. Les musiciens qui viennent ici c'est une gang de fumeux de clopes. Une grosse gang de mottés. Y'en a des pires que d'autres tsé, des crottés, des pouilleux, des buzzés, des pardus, des mongoles à batterie, c'est comme dans toute, tsé y'a plein de sortes de chips, y'a plein de sortes de monde. Moi j'aime ça quand sont pas là. J'aime ça être tout seul dans la bâtisse. Après une demi-heure trois quarts d'heure, j'ferme la radio. J'sors dehors, j'm'assois sur la table à pique-nique, j'finis ma bière tranquille, pis j'rentre en d'dans. C'est niaiseux, mais j'pense que c'est ça que j'aime le plus de jouer de la musique. Faut s'préparer.

C'est important de se préparer. Vraiment important. Parce que si j'arrive au local, que j'commence à jouer, pas prêt, j't'énarvé, ça sonne moins. Y'a même des fois qu'ça sonne pas pantoute. Mon père me disait toujours, dans un contexte de discipline, que ce soit la musique ou le patin de fantaisie, y'a deux types de "performer". Y'a ceux qui sont prêts et ceux qui se préparent. C'pour ça que c'est important, vraiment important de se préparer. Parce que quand c'est l'temps de jouer, si t'es pas à 100% prêt, t'auras jamais 100% du succès que tu mérites.

Y'a rien de mieux, rien qui me donne autant de satisfaction, qu'une toune qu'y'a rentré en tabarnak. Quand tu pars à rire à la fin du dernier chord, pour aucune raison, parce que ton corps te dit de rire, parce que c'est une montée de bonheur dans l'cerveau qui fait exploser ta yeule avec un sourire innocent. C'est tellement l'fun, c'est la plus belle affaire qu'y'a pas. Voir dans les yeux de tes chums que vous croyez en les mêmes choses, que vous êtes là pour travailler ensemble, pour faire quelque chose de beau en criss. Faire dequoi qui va faire dire "ayoye" qui va faire dire "voyons donc". Moi ça m'fait dire j'ai hâte. J'ai hâte de recommencer, de la rejouer cette toune là qui m'fait vivre, qui m'fait passer à travers le temps plus vite que n'importe quelle osti de fusée.

J'suis certain que y'a du monde pour qui c'est la même affaire, mais avec autre chose. Y'en a que c'est cuisiner, y'en a que c'est lire des livres, regarder des films, voyager, écouter disques, s'asseoir au théâtre, classer une collection de roches, jouer au Parcheesi, s'toucher dans douche. C'est ça qu'y'est merveilleux au fond.
Le best c'est quand, comme moi, t'as trouvé du monde avec qui partager cette chose là. Le mieux ce serait d'en vivre, de pouvoir oublier tout le reste et juste faire ça, jouer d'la musique j'parle. C'est ça, ze rêve. J'pense que ça peut pas être plus clair.