vendredi 19 avril 2013

le "best of" bleu marin ferait l'affaire

Des vagues et des ondes
filets d'écailles et de vantouses
les coraux sauvages s'éperdent en nous
tentacules venimeuses de l'acide
ces montres sous les tapis
De verre trempé et de radeaux
J'y suis allé dans mon coeur
Donc j'y suis allé
et chanter pour de bon
dans les échos de l'abribus
penser quitter ce nid de fous
qui rampent pour se cacher du monde
qui creusent pour échapper au sort
Ces bêtes d'ombres et de dangers
Elle marchent parmi mon corps
Ces meutes pesantes elles me traversent
Les coups de requins-marteaux
résonnent entre nos carapaces
prises dans les algues au fond du lac
Ma vie se noie dans la folie
Dans l'insomnie de mes pensées de toi
Dans les mains moites de mendiants
Mendiant d'amour crache sur l'argent
chercheur de temps mangeur de vers
Colibrium de liberté
Mesure le pouls de l'océan

J'neckerais encore sur les Beatles

Danser en silence sur la plage de pixels
Au rythme des craquelures sillonneuses
Se piquer pour trouver le sourire
Et la caresse des méduses
La tête penchée de droite à gauche
Dénudé de toutes les malices
Crachat sur les instants magiques
Tout sera banal même ce baiser tranquille
Après la danse sur le balcon
Avec la langue bien doucement
Toucher la volupté des astres
Comme une science de la façon
Une expérience de p'tit garçon
Encore une fois chanter très haut
Le bonheur d'avoir touché le fond
Se délecter des résonances
De sa voix muant en échos
D'Paul McCartney en stéréo
Une cigarette pendant Blackbird
En r'venant d'une game des Expos

lundi 15 avril 2013

Tes tounes préférées

Pis quand j'repense aux connections
J'voudrais qu'on s'colle sur de la prose
J'irais soupirer sur ta nuque
Qu'j'voudrais qu'on l'fasse dans toutes les poses

Pour que tu penses que c'est l'bon vent
Qui te chante tes tounes préférées
Qui souffle sur ta peau mouillée

On s'crissera tout nus dans piscine
Jaser de nos histoires de têtes
Des malheurs qui sont arrivés
Ben ben avant qu'on s'mette à s'voir

Ça donne le goût d'fumer
Qu'ça vaille le coup de s'exiler
Ça donne le goût d'avoir une blonde
Qui file que j'file pour m'défiler

jeudi 11 avril 2013

Passe-Partout


et les doigts me font mal
à force de me retenir
de ne pas toucher la gerbe
qui me cuit au visage

et ça y est je succombe
j'en prends quelques bouchées
ça goûte le sel et l'hécatombe
les milliers de vaches entroutcutées

et ça goûtait la plotte au ketchup
les rasades de bière flatte
puis l'amertume de dèche vieillie
ça m'écorche la peau jusqu'au calcaire

se gaver de gerbe comme un vrai hippie sale
comme si j'étais tenté par la crasse
d'une vieille chatte enrhumée
à qui on aurait par deux fois déchiré l'hymen

donc je me noie dans la honte diète
qui pétille sur moi sa coutellerie d'argent
vingt piastres dans craque pis trente piastres de crack
j'me crosse sur passe-partout ça fait sortir le méchant

vendredi 1 mars 2013

ashes of american flag

All my lies are always wishes
I know I would die if I could come back new

samedi 8 décembre 2012

Naima

Il était très tard au café, ma tête reposait sur mes bras croisés en oreiller sur le comptoir et je me disais à quel point il était rafraîchissant de voir le monde d'une autre façon. Les tasses vides sur les tables occupées, les cigarettes brûlantes dans les cendriers, les quelques clients, un ou deux d'assoupis, les autres méditant, bouches closes. C'était silence pour écouter Trane chanter. Je me sentais comme du pétrole, raffiné comme de la bière de blé, c'était un de ces moments simples courts que j'aurais souhaité double allongé.
Un vieil homme était accoudé au piano droit à l'autre bout de la salle, il fumait lentement en attendant son tour. D'où j'étais je ne voyais que son profil. Un visage usé, une paupière tombante surplombée de minces cheveux en broussaille, grisonnants, à travers lesquels la fumée se tressait, et je voyais dans ce nuage des poussières virevolter parmi la lueur d'une lampe à lutrin.
Trane, à souffle perdu, cligna de l'oeil au vieillard qui déposa ses doigts sur les touches de son piano. Son dos se raidit comme dans un élan de jeunesse, et il prit la relève du morceau. Un accord ou deux, et il sembla qu'une basse fréquence fit frissonner le contre-bassiste à sa gauche. Cet imposant instrumentiste effleurait sensuellement ses cordes en enlaçant contre lui sa muse de bois. Ils dansaient lentement, comme j'aurais voulu que mes parents le fassent autrefois, serrés l'un contre l'autre, les yeux fermés, déconcentrés, deux verres de porto vidés sur le tapis du salon.
Une demi-douzaine de lampions fatigués éclairaient encore le café, et dehors la neige blanche reflétait la flamme froide du chandelier lunaire. Derrière une fenêtre embuée, je vis une ombre marcher à l'extérieur. La silhouette encapuchonnée entra rapidement et je me redressai du même coup, discret, curieux.
Je me souviens encore avoir avalé de travers lorsque la lumière me révéla son visage. Jamais je n'aurais pu imaginer que la beauté d'une femme puisse me rendre si vulnérable. Je sentais descendre en moi les doses augmentées de dopamine, et mes nerfs désaccordés me jouaient des airs que je ne reconnaissais pas.
Elle vint s'asseoir à côté de moi et se dévêtit de son long manteau. Elle demanda un café du bout de ses lèvres rougies, avec son accent parisien d'un érotisme déstabilisant.
Dans mon âme noircie par les tempêtes et les glaces s'allumèrent d'un seul coup toutes les bougies du monde.
Elle tourna la tête vers la mienne en replaçant d'un coup de doigt sa chevelure d'ébène. Au fond de ses yeux je voyais le reflet de Trane qui soufflait dans son tuyau cuivré. Au fond de ses yeux je voyais le visage de la musique. Et je voyais mes yeux qui reflétaient aussi les siens, beaux et clairs comme les abîmes du soleil.

jeudi 15 novembre 2012

Mercredi et les bestioles

Tout commença lorsqu'il fit noir. Les lumières disparurent, la rumeur s'apaisa à l'intérieur du théâtre. Les enfants curieux s'avancèrent au bout de leur siège, regardant fixement une mince lueur gigoter sous les tissus du rideau un peu trop court. On pouvait y voir des ombres faire du va-et-vient, des pieds noirs s'agiter, se promener rapidement dans l'arrière scène. Et parfois, plus rien. C'était l'obscurité complète et dans la salle silencieusement euphorique on s'impatientait joyeusement.

Dans le ventre de Mercredi, des bestioles s'excitaient. Elles volaient en cercle entre ses côtes. Mercredi gloussa discrètement, ça le chatouillait tant.
Il se disait qu'il avait déjà eu cette même sensation, étant enfant, lorsqu'il jouait à la cachette avec son ami Robinson.


Mercredi courrait se cacher. À vive allure il avançait dans les champs de grands épis, sous le faible soleil de vingt heures. Un peu plus loin, derrière une cabane qui semblait abandonnée, entre une statuette poussiéreuse de la Sainte Vierge et un pot en terre cuite à moitié fendu, se situait une vieille porte boisée et pourrie que Mercredi n'avait jamais eu l'audace d'ouvrir.
C'était une entrée à deux portes battantes placées à 45 degrés sur une sorte de structure de pierre ne pouvant être autre chose qu'un accès extérieur menant à une cave, sous la maison.
Mercredi sortit son canif et coupa sans difficulté la corde qui barrait ensemble les deux portes. Il les entrouvrit et une senteur de secret émana de l'ouverture. Derrière descendait un escalier de bois dont les fissures étaient engorgées de terre. Mercredi le descendit prudemment jusqu'à une autre porte entrebâillée. Il entra rapidement en se rappelant que Robinson était toujours à sa recherche. Il referma derrière lui.

Une fenêtre par laquelle entrait le coucher de soleil permettait à Mercredi de partiellement voir la pièce dans laquelle il s'était aventuré. Tout autour de lui se dressaient des amas d'objets ayant tous l'air plus anciens les uns que les autres. La majorité était composée de meubles antiques, mais il pouvait y voir des fourches, un seau d'eau rouillé, des bouteilles de lait vides, un paquet de cartes à jouer, des piles de livres immenses. Il avançait lentement au milieu de la pièce. Dans le mince filet de lumière qui traversait la fenêtre, il voyait voler l'épaisse poussière que ses pas faisaient monter en l'air. À l'autre bout de la salle un large bureau recouvert d'une couverture attira son attention. Une fois devant le meuble en question, il mit les mains sur le tissu et le tâta un peu partout, fermant les yeux, s'imaginant ce qu'il pourrait bien trouver en dessous. Un trésor, pensait-il. Parmi tout le mobilier que contenait la cave, c'était assurément le seul qu'on avait prit soin de cacher. Il tira la couverture de manière plutôt spectaculaire, ce qui fit décoller d'un coup la poussière dont elle était saturée. Mercredi s'étouffa et se frotta le visage couvert par la saleté. Il vit ensuite à sa grande déception une demi-douzaine de banales caisses de bois, sur lesquelles étaient dessinées des pommes bien rouges. Il s'approcha et se rendit compte qu'à l'intérieur de ces boites, il n'y avait pas de fruits, mais bien d'étranges cartons. Surpris et intrigué, Mercredi en saisit un en particulier, car les couleurs de celui-ci avait attiré son regard. Sur le carton était imprimé l'illustration d'un homme en robe, assis en indien sur de nombreux coussins, un long instrument posé entre ses jambes. L'homme le tenait bien haut de sa main gauche tandis que sa main droite reposait au bas de celui-ci sur ce qui ressemblait à de longs fils métalliques. Mercredi fit tourner le carton entre ses mains et trouva une fente sur l'une des extrémités. Il regarda à l'intérieur et il y trouva un objet noir de forme circulaire. Il le sorti du carton qui était évidemment une enveloppe faite sur mesure pour l'objet. Mercredi s'approcha du peu de lumière qui restait alors dans la pièce. Il mit l'étrange objet directement face au rayon de soleil et l'observa attentivement. De fins sillons étaient gravés sur les deux faces de ce qui semblait être nulle autre chose qu'un disque.
Mercredi se rappelait que sa mère lui avait déjà parlé de ces disques à l'heure du coucher. Elle disait que c'étaient des objets de magie, et que dans leurs sillons se cachaient d'invisibles merveilles.

C'est alors que Mercredi entendit des bruits de pas venant de l'extérieur. Robinson approchait. Le disque lui glissa des mains et il alla sans le ramasser se cacher un peu plus loin, derrière un coffre que cachait un porte-manteau roulant. Dans l'obscurité de sa cachette, l'excitation l'envahissait vivement. Les bestioles dans son ventre volaient entre ses os. L'angoisse et la peur, confrontés au confort et à la sûreté de la cache, lui donnait cette sensation d'impuissance mais aussi de totale invincibilité. Mercredi sentait l'odeur des vieux vêtements, du parfum de jadis qui imprégnait encore le tissu des gilets. Ça lui rappelait ses grands-parents. Robinson avait ouvert la porte de la cave, il descendait en murmurant, la respiration haletante.

Les bestioles s'agitaient de plus en plus à l'intérieur de Mercredi, et c'est cette exacte sensation qu'il ressentait à l'instant même où les lumières s'étaient éteintes dans la salle de spectacle, les pieds des fébriles artistes faisant les cent pas, en arrière des rideaux trop courts.

C'est soudainement que ceux-ci furent tirés et qu'une lueur éclaira le décor de la scène, sortant Mercredi de ses souvenirs. Un tapis rouge comme la plus rouge des pommes était étendu au milieu du plateau. Sur ce dernier, on avait placé de fastes coussins de satin. Une poursuite dorée descendait du haut de la salle et éclairait la somptueuse estrade.
Un homme portant le Sherwani indien traditionnel s'avança lentement sur les planches, puis prit place, assis les jambes croisées, parmi les coussins.

Mercredi sourit, en se rappela avec nostalgie la première fois qu'il avait vu cet homme.
C'était au fond d'une cave sur la pochette d'un disque poussiéreux.